La photonique de silicium s’impose comme un pilier de l’ère de l’intelligence artificielle et redessine la carte du pouvoir dans l’industrie des semi-conducteurs. Intel, pionnier historique de ce domaine, voit aujourd’hui sa domination remise en cause par TSMC, qui multiplie actuellement les dépôts de brevets et accélère sur l’industrialisation de solutions optiques. Samsung s’invite également dans la danse, tandis que NVIDIA et AMD avancent leurs propres cartes pour ne pas être distancés dans la course aux puces de nouvelle génération.
Intel recule sur les brevets
Entre 2015 et 2022, Intel enregistrait en moyenne plus de 2 500 brevets par an aux États-Unis liés à la photonique de silicium, avec des pics au-delà de 3 000. Mais en 2023, ce chiffre a chuté à 2 263. Dans le même temps, TSMC a pris de l’ampleur. Après un quasi-équilibre en 2023, le fondeur taïwanais a déposé près du double de brevets qu’Intel en 2024, avec une cinquantaine de dossiers contre seulement 26 pour son rival américain. Une tendance qui illustre une perte de traction inquiétante pour la firme de Santa Clara.
TSMC accélère sur le Co-Packaged Optics
TSMC ne se contente pas de rattraper Intel sur le terrain des brevets. Le fondeur a déjà lancé des développements concrets autour du Co-Packaged Optics, une technologie qui associe directement optique et électronique dans un même “packaging”. L’objectif est de réduire la consommation énergétique et de répondre aux besoins croissants en bande passante des GPU pour l’IA.

Le projet COUPE, déjà en démonstration, réunit 220 millions de transistors et un millier d’éléments optiques sur une architecture en trois couches. On y retrouve un circuit électronique en 6 nm couplé à un circuit photonique en 65 nm, capable de transmettre des signaux aussi bien à l’horizontale qu’à la verticale. TSMC prévoit d’intégrer cet assemblage photonique dans ses technologies CoWoS et SoIC, avec une cible de 1,6 Tb/s d’ici fin 2025 et une production de masse attendue pour 2026.
Intel défend ses positions mais reste fragilisé
Face à cette montée en puissance, Intel conserve pourtant un avantage en recherche et développement, mais peine à transformer ses efforts en solutions concrètes. L’entreprise se concentre encore sur des phases préliminaires et mise davantage sur la valorisation de ses technologies existantes. Les substrats de verre, longtemps développés en interne, sont désormais proposés en licences à des partenaires tiers. Un repositionnement qui traduit les difficultés d’Intel à maintenir une production intégrée, aggravées par des retards sur des nœuds clés comme l’Intel 18A et par l’abandon de projets d’usines en Europe.

Cette stratégie défensive ouvre la porte à de nouveaux acteurs comme Samsung Electro-Mechanics ou Absolix, qui pourraient devenir des fournisseurs majeurs dans ce segment. Le risque pour Intel est clair : passer de producteur à simple client dans un domaine où elle avait pris une avance significative il y a dix ans.
NVIDIA et AMD se positionnent aussi
Le duel entre Intel et TSMC ne doit pas faire oublier également l’entrée en scène d’autres géants. NVIDIA travaille déjà à intégrer la photonique dans ses commutateurs Quantum et Spectrum, avec des débits visés de 1,6 Tb/s par port dès 2025. De son côté, AMD a récemment acquis Enosemi, une startup spécialisée dans les circuits photoniques intégrés, renforçant ainsi ses capacités dans ce domaine stratégique.
Quel avenir pour Intel Foundry Services ?
La question se pose désormais : Intel Foundry Services (IFS pour les intimes) peut-elle encore espérer jouer un rôle dans la photonique de silicium ? Rien n’est encore perdu, mais la trajectoire actuelle place clairement TSMC en position de force. Intel garde des atouts en recherche, mais doit impérativement franchir le cap de l’industrialisation pour éviter de perdre définitivement la main.
Le match est lancé et il décidera en grande partie de qui détiendra les clés technologiques de l’infrastructure IA de demain.
Sources : xueqiu.com ctee.com.tw